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Mémoires de Joseph BARBA

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1840 à 1858 - Etudes 1858 à 1862 - à Polytechnique 1862-1866 Lorient

Le texte qui suit est la transcription du texte dactylographié des Mémoires écrites par Joseph Barba.
Toutes les notes (marquées Ndlr) ont été ajoutées par moi pour expliquer ou agrémenter ce texte. Pour lire ces notes, cliquer sur le numéro de la note. Pour revenir au texte, cliquer sur le numéro de la note elle-même.

Quelques jours avant la date de la rentrée à l'école, nous sommes partis, mon père, ma mère et moi, en nous arrêtant d'abord à Saint-Mihiel puis à Vitry-le-François où demeurait le frère de ma mère, Antonin Willaume. En arrivant à Paris, nous fûmes reçus par le capitaine Aubert du 2ème grenadiers de la garde. Il s'était procuré à notre intention quelques cartes de visite des principaux monuments pouvant nous intéresser. C’est ainsi que nous avons vu les Gobelins, la Monnaie, les Catacombes, et autres monuments que je n'ai pas visités depuis. Cependant en arrivant à Paris, un de mes premiers soins avait été de me présenter à l'École polytechnique. Je dus subir là un examen médical et je fus reconnu « bon pour le service ». Ma taille était alors de 1m78[11]. J'étais franchement plus petit que mon père et mes oncles Barba. On trouva dans des vêtements tout faits une petite tenue m'allant suffisamment bien. Je reçus un chapeau à claque et un bonnet de police à gland rouge. Le gland rouge était la caractéristique de ma promotion, celle des anciens ayant le gland jaune. J'avais surtout mon épée « la tangente » comme on l'appelait. J’en étais très fier quoiqu'elle m'empêchât un peu de marcher.

Le premier dimanche qui suivit ma rentrée eut lieu « l’absorption » cérémonie absurde et écœurante espèce de brimade que les anciens imposaient à leurs conscrits. Elle avait lieu au Palais Royal, au café Hollandais et s'est continuée par la tradition jusqu'à ces dernières années. Je crois que récemment elle a cessé sur la demande du Ministre de la Guerre.

Ma salle était composée de 7 élèves, tous assez travailleurs. Je trouvais le régime de l'école un peu fatiguant. Je me ressentais du coup de collier que j'avais donné l'année précédente pour me faire recevoir et puis j'ai toujours eu besoin de beaucoup de sommeil. Nous sortions deux fois par semaine, le mercredi à deux heures et le dimanche toute la journée, après la revue que passait le général Eble qui commandait l'école.

Mon père avait chargé Monsieur Mayer, correspondant de la maison de Wendel à Paris de me servir une petite pension mensuelle de 30 Francs que je trouvais bien minime car il me fallait payer mes repas à l'extérieur à moins de rentrer plutôt à l'école pour ne pouvoir plus en sortir ensuite. Nous devions rentrer à 10 heures sauf les jours de prolonge où nous avions la permission de minuit, ce qui nous permettait d'aller au théâtre.

Nous étions très unis dans ma salle, nous avons fait ensemble quelques parties. Je me rappelle, par exemple, avoir été faire avec mes camarades un petit voyage au Havre, Honfleur et Trouville. C’était lors de la Pentecôte de 1869. Nous avions deux jours de congé. Nous sommes partis à minuit de la gare Saint-Lazare et auparavant j'avais été à l’Opéra-comique avec Madame Spire et ses deux filles entendre « La part du diable[12] ». Madame Spire était venue passer quelques jours à Paris. Mais les visites de membre de ma famille étaient bien rares.

Nous avions comme professeur : pour l'analyse Joseph Bertrand[13], qui fut secrétaire perpétuel de l'Académie des Sciences. Il avait eu le nez cassé dans un accident de chemin de fer.

Pour la descriptive, de La Gournerie[14]. Il passait pour avoir été condamné à mort étant officier de Marine, puis gracié. Il avait un catarrhe permanent et il ne finissait pas ses phrases, mais il se faisait comprendre par les gestes qu'il prodiguait.

Pour la physique, Jamin, qui arrivait à l'amphithéâtre avec une nombreuse suite ; ses deux colleurs Guignet et Bary, puis son préparateur Obeliane, puis un garçon de salle. On s'amusait à les numéroter.

Victor Regnault[15] enseignait la chimie, ses cours n'étaient que la reproduction de son ouvrage en quatre volumes.

Notre professeur d'architecture était Léonce Reynaud[16], inspecteur général des Ponts-et-Chaussées remarquable par les véritables œuvres d'art qu'il crayonnait au tableau, représentant les monuments les plus compliqués, les cathédrales par exemple. On regrettait de le voir les effacer avec l'éponge à la fin de la classe.

Le colonel Laussedat[17] faisait un cours d'astronomie et de géodésie bien endormant.

Le général Favé[18], aide de camp de l'empereur nous enseignait l'art militaire, mais son cours, tout à fait suranné fut bien vite oublié par nous.

Les cours avaient lieu surtout dans la matinée, avant deux heures.

Notre principal repas avait lieu alors et nous criions un peu famine n'ayant eu le matin qu'une mince tasse de lait ou quelques sardines. On ne rentrait au travail qu'a cinq heures et dans l'intervalle, on pouvait se livrer à toute sorte de distractions quand on ne faisait pas l'exercice. On pouvait le reste du temps aller à la bibliothèque ou prendre des leçons d'escrime, de musique, jouer au billard etc… On pouvait encore un peu travailler mais pas dans les salles d'études.

En deuxième année, nous étions encore 7 dans ma salle. Le chef de salle était Sadi-Carnot[19] qui devint Président de la République. Il avait été malade une année précédente et avait obtenu de faire à l'école une 3ème année. Il était déjà ardent républicain, laborieux et bon camarade.

Pendant que j'étais à l'école, eut lieu la rentrée des troupes d'Italie. Je pus assister avec la plus grande facilité à ce brillant défilé. Nous avions la faculté de rester à l'intérieur de la haie qui était formée sur tout le parcours. Le capitaine Aubert y figurait.

A la fin de la deuxième année, le classement final me permit d'avoir le Génie Maritime, ma promotion était de 10 élèves ingénieurs, celle de mes anciens n'était que de 5. Les deux promotions suivantes furent aussi de 10 élèves cc qui montrait le développement qu'on voulait donner aux constructions navales.

Les ingénieurs de la Marine ou officiers du Génie Maritime ou ingénieurs des constructions navales, car on les appelait indifféremment ainsi, étaient militaires considérés comme officiers sans troupe. Ils portaient, en petite tenue, l'uniforme des officiers de marine moins les attentes aux épaules. Ils avaient des parements de velours noir à l'extrémité de leurs manches ce qui les rendait reconnaissables.

L'École du Génie Maritime était à Paris au coin de la rue des Saints Pères et de la Rue de l'Université, dans le bâtiment actuellement occupé par l’école orientale des langues vivantes.

Le Napoléon

 

 

 

 

 

 

Le Napoléon

L'enseignement y était assez faible, les cours n'étant pas très définis ni très étudiés. La Marine avait alors comme directeur du matériel Dupuy de Lôme[20] qui avait construit le « Napoléon[21] », premier vaisseau à hélice à grande vitesse qui avait joué un rôle brillant dans la guerre de Crimée, en remorquant un vaisseau anglais alors que ce navire n'avait pas pu remonter le courant. Il construisit encore à ce moment, le premier navire cuirassé « La Gloire ». La Marine était alors en pleine transformation, presque tous les navires importants étaient en bois. La plupart encore à roues. On commençait à peine la construction de quelques navires en fer.

L'artillerie était aussi en grande transformation, les canons étaient en fonte, lançaient des projectiles sphériques. On venait d'introduire dans l'armée les canons rayés qui avaient été si remarqués pendant la guerre d'Italie.

Au milieu de toutes ces transformations, les professeurs de l'école qui étaient presque tous des ingénieurs de la marine, étaient fort embarrassés pour établir leurs cours.

Après les trois années de temps de pioche que j'avais du traverser, j'avoue que je ne travaillais pas avec autant d’ardeur en arrivant à cette école dont les cours ne paraissaient pas très passionnants. Ils l'étaient d'autant moins qu’il fallait les abréger car ma promotion n'est restée à l'école que pendant 18 mois au lieu des 3 années qui sont consacrées actuellement à cet enseignement.

Nous étions externes, notre séjour à l'école était employé seulement aux cours et aux projets qu'il nous fallait faire, projets de navires dont nous devions représenter les formes extérieures et calculer le déplacement et la stabilité.

Mon temps était employé au dehors par quelques relations mondaines, des visites aux musées, surtout au musée du Louvre, des parties de Whist que je faisais avec mes camarades et la lecture. L'hiver, je lisais volontiers dans mon lit pour économiser le bois.

Nous avions une solde pour la première fois, elle n'était pas merveilleuse, je crois me rappeler que c'était l50 frs par mois. Mon père m'avait donné quelques valeurs, provenant de la succession de ma mère rapportant à peu près 1200 Frs par an. J'avais donc 250 frs à ma disposition par mois, ce n'était pas le Pérou mais enfin cela pouvait suffire en étant économe. Je pris un appartement au coin de la rue Bonaparte et de la rue Jacob, assez à proximité de l'école. Nous avions une pension dans la rue Saint-André-des-Arts mais bientôt nous nous contentions des petits restaurants du quartier puis nous allions au café Caron prendre notre tasse de café.

Au commencement du mois de mai 1861, on nous envoya en mission dans les ports. Je fus envoyé à Rochefort ainsi que mon camarade Bès de Berc. Mais les travaux n'étaient pas fort intéressants. On ne faisait guère de constructions navales, je n'y voyais commencer qu'un seul navire en bois, toujours, le transport « Flore » je ne me rappelle pas très bien les travaux qui attirèrent mon attention, cependant j'y vis le lancement d'un grand navire « Le Sémiramis ». C'était un ancien vaisseau à voiles commencé depuis bien des années. C'était l'habitude pour les constructions en bois, de les laisser longtemps sur cale pour assurer la dessiccation des bois et en rendre la conservation plus efficace. On avait transformé le bâtiment d'après des idées qui ont été appliquées sur plusieurs autres navires. On séparait le navire sur cale par la moitié et on introduisait entre les deux parties une autre partie à peu près cylindrique se raccordant sensiblement avec les deux premières. On changeait profondément l'avant et l’arrière de façon à les affiner. On conçoit qu'après de semblables transformations les navires n'avaient pas des propriétés très remarquables. Le lancement était dirigé par Monsieur de Lisleferme, ingénieur en chef. C’était une opération délicate à cause de la longueur du bâtiment et du peu de largeur que présentait La Charente en face de la cale de construction. Il fallait faire tourner rapidement le navire dès qu'il abandonnait la cale pour le diriger dans le sens de la rivière. On disposait à l'arrière un plan résistant de grandes dimensions mais il fallait surtout recourir à l'action de deux vigoureux câbles, énormes, qui étaient attachés à plusieurs ancres solidement enfoncées et maçonnées dans le sol. Ces câbles étaient plusieurs fois repliés sur eux-mêmes le long de billots en bois et les parties voisines étaient rattachées par des cordes résistantes qu'on appelait bosses cassantes[24]. Ces cordes étaient destinées à se rompre. Progressivement, chacune de ces ruptures, après beaucoup de résistance, retardant la marche du navire. Un de ces câbles cessait de résister après un certain parcours et le navire soumis à la seule résistance de l'autre câble, tournait autour de son extrémité avant et se dirigeait dans le sens voulu.

J'avais eu l'idée de vouloir étudier le mouvement du bâtiment dans sa descente le long de la cale et j'avais imaginé un petit appareil dont j'attendais un heureux résultat. On s'empressa de me faciliter les moyens de faire mon expérience. A l'extrémité inférieure avant du navire était attachée une corde qui venait s'enrouler sur un tambour revêtu d'un papier, le long de ce tambour en suivant une génératrice du cylindre, un crayon se déplaçait avec un mouvement uniforme. Une hélice devait être ainsi dessinée sur le papier mais les mouvements désordonnés de la corde, tantôt raidie, tantôt lâche, déterminaient sur le tambour un mouvement saccadé qui devait forcément troubler les résultats. J'avais bien essayé de remédier à cet inconvénient en adaptant un frein au tambour pour ralentir ses mouvements accélérés mais le résultat ne fut pas très satisfaisant, de plus, les parcours du navire produisaient une hélice à spires très rapprochées et très nombreuses qui n'étaient pas de nature à donner de la précision aux différentes mesures. Je ne tirai pas grande conclusion de cette expérience qui était inspirée par l’appareil du général Morin pour étudier la chute des corps.

Monsieur de Lisleferme avait un ménage très accueillant. Sa femme était charmante, ils n'avaient pas d'enfants et ils nous recevaient volontiers. Il nous invita un jour à venir à sa propriété de Taillebourg, le long de la Charente, à quelques lieux de Rochefort et nous y passâmes une très agréable journée. D'autres ingénieurs rendaient à Rochefort la société agréable. Il y avait le ménage Brun, également sans enfants. Monsieur Brun, ingénieur en chef, était chargé de la section des machines. Il avait en outre à diriger la construction du « Plongeur », ancêtre prématuré des sous-marins. Il était construit sous un hangar dont l'entrée était formellement interdite, même à nous jeunes ingénieurs, je ne sais si l'idée de la construction n'avait pas été suggérée par celui qui devint plus tard l'amiral Bourgeois[25], mais les résultats ne furent pas du tout satisfaisants, j'appris plus tard que le « Plongeur » avait fait quelques essais dans un bassin de radoub, essais tout à fait infructueux et on dût l'abandonner. On ne connaissait alors ni les moteurs à explosions à essence ni les accumulateurs, c'est-à-dire, les deux engins qui ont rendu possible la construction des sous-marins.

Le Plongeur


 

 

 

 

 

 

 

 

 

Sous-marin le « Plongeur » de Bourgeois et Brun (1863)

Madame Brun était aussi bon camarade que son mari. Elle était fille de Monsieur Dingler, directeur des constructions navales à Indret. Ses deux sœurs épousèrent successivement notre camarade Willotte que je connus plus tard à Lorient.
Les travaux de la « Flore » étaient dirigés par l'ingénieur Boden, assez ordinaire qui n'eut pas une carrière brillante.
Mes souvenirs ne sont pas très précis sur l'emploi de mon temps pendant la mission à Rochefort. J'imagine que mon journal de mission ne devait pas être des plus remarquables alors que mes camarades, envoyés dans d'autres ports, avaient sous les yeux des constructions plus intéressantes.

J'eus l’occasion à Rochefort, d'assister aux essais d'un petit aviso en fer qui avait été armé pour aller dans un pays étranger et il devait faire quelques essais avant de partir. On avait embarqué à bord des moutons et des poules. J'obtins d’être embarqué officiellement à bord. Les premiers essais se firent sans incident mais un grand navire à voiles nous fit des signaux de détresse. Il n'avait pas pu doubler la pointe de l'ile d'Aix et il se voyait près d'être jeté à la cote sur des rochers inhospitaliers. On s'empressa d'aller à son secours et quand on fut arrivé à une distance convenable, on lui envoya une remorque. La remorque se fit d'abord sans difficultés mais avec les mouvements de tangage qui étaient très sensibles, l'amarre avait des mouvements d'oscillation dangereux, elle finit par s’engager autour de l’hélice et le mouvement de la machine devint absolument impossible. Notre situation devenait également dangereuse. On jugea prudent de mouiller à l'endroit où on était. Cependant la mer baissait et on se demandait avec inquiétude s'il y aurait assez de profondeur pour empêcher l'échouage. Heureusement, on avait vu du port de Rochefort les signaux de détresse du navire à voile et on avait envoyé en toute hâte un remorqueur qui, voyant la situation précaire d'un navire de l'État commença par lui porter son secours. On leva l'ancre et nous fûmes remorquer rapidement. Mais les roches sur lesquelles nous étions passés sans difficulté à mer haute étaient maintenant rapprochées de la quille et dans les mouvements de tangage, nous éprouvâmes des coups de talon bien impressionnants. Les animaux eux-mêmes sentaient la gravité du péril, les moutons vêlaient et les poules manifestaient la plus grande agitation. Grâce à Dieu, on parvint à sortir de cette situation sans beaucoup de mal. Nous fûmes remorqués au port de Rochefort. On entra le bâtiment au bassin, on dégagea l'hélice et on constata que la quille n'avait pas été très détériorée. Quant au bâtiment marchand je ne sais quel fut son sort.

Pendant mon séjour à Rochefort, nous avons fait quelques excursions, par exemple, à la Rochelle. Je me souviens surtout d'une excursion que nous fîmes d'abord au Fort-Boyard, puis à Boyard-Ville, à la pointe de l'Ile d'Oléron. Nous allâmes de là, par une marche pénible au milieu des sables jusqu'à la capitale de l'ile où nous couchâmes pour gagner Marennes le lendemain et de là, rentrer à Rochefort.
Un soir, en rentrant dans ma chambre, je la trouvai pleine de fumée. Une cigarette ou un cigare mal éteint avait mis le feu à la sciure de bois qui remplissait un crachoir et la combustion s'était communiquée au plancher, brûlant quelques lames et entamant une poutre qui était au-dessous. Ma bourse a gardé le souvenir de cet incendie.

A la fin de la mission, nous avions un mois de vacances. Je rentrai chez mes parents. Ma famille était alors sous la pénible impression produite par la catastrophe qui avait frappé la famille Spire. Il fallait prendre un autre médecin. Le choix se porta sur Monsieur Chollot, qui demeurait à Fontoy à une dizaine de kilomètres. C'était encore bien loin pour les cas urgents. Il était le père d'un camarade du lycée de Metz un peu plus jeune que moi qui fit sa médecine à Paris et mourut très jeune d'une piqure anatomique[26].
Les distractions de mes vacances furent la chasse et la foire de Thionville avec la visite ordinaire à mes oncles de Rettel et de Stiting-Wendel.
Je me rappelle avoir passé avec Henri de Wendel, qui était alors élève de Centrale, quelques soirées dans la chambre d'Adolphe Lang qui demeurait à l'extrémité du château opposée à notre appartement. Nous y fumions des cigares ou des pipes et discutions sur des questions intéressantes.

Mon second hiver à Paris n'a pas laissé dans mon souvenir des traces bien particulières. Cependant j'eus cette année une invitation au bal des Tuileries. J’ai été frappé par l'escalier d'entrée avec sa double haie de cent gardes, par la beauté de l'impératrice que je pus contempler tout à loisir. Elle n'était pas alors de toute première jeunesse. Je remarquai aussi la gourmandise et le sans-gêne de tous les habits brodés qui se pressaient au buffet et qui étaient vraiment dégoutants. Il me semble avoir eu également une invitation pour le bal du Ministère de la Marine, occupé alors par de Chasseloup-Laubat[27], qui avait épousé une bien belle personne.

A la fin de notre séjour à l'école, il y eut un examen général et un classement dans lequel je n'occupai pas un rang merveilleux. Je m'y attendais bien d’ailleurs.

Je fus nommé Ingénieur de 3e classe, à deux galons, c'était un grade équivalent à celui d'Enseigne et je fus désigné pour le port de Lorient.

1840 à 1858 - Etudes 1858 à 1862 - à Polytechnique 1862-1866 Lorient

[11] Ndlr : dans son dossier de l’Ecole Polytechnique, la taille indiquée est de 1,75m. Réf [1].

[12] Ndlr : opéra-comique (1843) en 3 actes de Daniel Auber (1771-1882) sur un livret d’Eugene Scribe. Réf [2].

[13] Ndlr : Bertrand, Joseph Louis François (X 1839 ; 1822-1900). Auditeur libre à onze ans puis major de l'École polytechnique, il devient ingénieur des mines, mais démissionne en 1846 pour se consacrer à l'enseignement. Il professe les mathématiques aux lycées Saint-Louis et Napoléon. Devenu examinateur d'admission et répétiteur à Polytechnique, il est nommé maître de conférence à l'École normale et suppléant au Collège de France, dont il obtient, à la mort de Biot, la chaire de physique générale et de mathématiques (1862). Reçu à l'Académie des sciences (1856), il y devient secrétaire perpétuel (1874), avant de succèder à J.-B. Dumas à l'Académie française (1884). Spécialiste de physique mathématique, il est l'auteur de travaux sur les séries et sur la théorie des nombres (postulat de Bertrand). Réf [1].

[14] Ndlr : Maillard de la Gournerie, Jules Antoine René (X 1833 ; 1814-1883). Major de l'École navale (1830), il sert à la correspondance et au transport des troupes entre Toulon et Alger (1831-32). Traduit en conseil de guerre à la suite d'une altercation avec un lieutenant de vaisseau (1832), il est acquitté mais décide de faire Polytechnique. Ingénieur des Ponts et chaussées (1835), il achève le phare des Héaux de Bréhat, sous les ordres de Reynaud, lequel avait commencé l'ouvrage. Il prend part à la construction de la grande jetée du Croisic et contribue à la création du bassin à flot de Saint-Nazaire. Professeur de géométrie à Polytechnique (1850-63) et au Conservatoire des arts et métiers (1854), il publie un "Traité de perspective" (1859) et un "Traité de géométrie descriptive" (1864), qui constituent, avec ses travaux sur les arches biaises, une référence. Auteur de "Recherches sur les surfaces réglées tétraédrales symétriques (1867), il est élu membre libre de l'Académie des sciences (1873). Il achève sa carrière dans son corps comme inspecteur général. Réf [1].

[15] Ndlr : Regnault, Henri Victor (X 1830 ; 1810-1878). Chimiste et physicien, il se consacre essentiellement à l'expérimentation qu'il mène avec beaucoup de rigueur, notamment dans la mesure du quotient respiratoire avec Reiset. Mais ses travaux portent surtout sur les changements d'états comme la compressibilité, la dilatation et l'ébullition. Il succède à Gay-Lussac comme professeur de chimie à l'École polytechnique et entre à l'Académie des sciences (1840). Professeur de physique au Collège de France (1841), il est promu ingénieur en chef des mines (1847) et directeur de la manufacture de Sèvres (1854). À la mort de son fils, il renonce au professorat (1872). Réf [1].

[16] Ndlr : Léonce Reynaud (1802-1880) est renvoyé de l’École polytechnique en 1822, dans climat d'agitation politique des étudiants parisiens, lié à la contestation du régime de la Restauration. Il sortira finalement en 1833 de l’école des Ponts et Chaussées. Augustin Fresnet lui confie la construction de  son premier phare sur l’ile de Bréhat en 1834 (il sera achevé en 1840) ; il fera toute sa carrière au Service des Phares qu’il dirigea. Réf [15].

[17] Ndlr : Laussedat, Aimé (X 1838 ; 1819-1907). Reçu en même temps à Normale et à Polytechnique, il opte pour cette dernière. Capitaine du génie, il invente la photogrammétrie (1850), met au point la première utilisation cartographique de la photographie (1862-1864) et conçoit des instruments d'optique. Il supplée (1853-55) puis remplace (1856) Faye dans son cours d'astronomie et de géodésie à Polytechnique. Adversaire de la paix avec l'Allemagne, il démissionne (1871), mais exécute néanmoins le tracé de la nouvelle frontière entre la France et l'Allemagne (1871). Il préside la commission des communications par voies aériennes (1872). On le nomme professeur de géométrie appliquée aux arts, à l'École des arts et métiers (1873). Colonel (1874), il prend sa retraite (1879). Directeur des études à l'École polytechnique (1879-1881) et directeur du Conservatoire des arts et métiers (1881), il devient membre de l'Académie des sciences (1894). Réf [1].

[18] Ndlr : Favé, Idelphonse (X 1830 ; 1812-1894). Il passe par l'École d'application de Metz et devient lieutenant d'artillerie. En 1845, il est adjoint au directeur des ateliers de précision au dépôt central de l'artillerie. En 1846, il publie le premier tome des Études sur le passé et l'avenir de l'artillerie, écrit par Louis-Napoléon pendant sa détention au fort de Ham. Louis-Napoléon, devenu Président de la République en 1848, appelle Favé qui publie alors son Nouveau système d'artillerie en 1850. Puis il est nommé professeur de fortification à l'École polytechnique, il devient l'officier d'ordonnance de Louis-Napoléon en 1852 puis son chef d'escadron. En 1853, au cours de la guerre de Crimée, il met au point pour l'attaque du port de Cronstadt des batteries flottantes cuirassées à vapeur, dont trois furent utilisées à Sébastopol en 1855. Chef du cabinet militaire de Napoléon III pendant la campagne d'Italie, il travaille ensuite sur l'artillerie à canons rayés et crée les premières mitrailleuses. Colonel en 1859, général de brigade en 1865, Favé est nommé commandant de l'École polytechnique en 1866. Il participe à la défense de Paris en 1870. En 1876, il est élu à l'Académie des sciences. Il professe l'art militaire à Polytechnique de 1874 à 1882. Réf [1].

[19] Ndlr : Carnot, Marie François Sadi (X 1857 ; 1837-1894). Préfet de la Seine-Inférieure, il est aussi commissaire extraordinaire de la défense nationale au Havre (janvier 1871). Partisan de la lutte à outrance, il démissionne. Député de la Côte d'Or (février 1871), il devient secrétaire de la Gauche républicaine. Conseiller général, il est élu député de Beaune (1876). Sous-secrétaire d'État dans les cabinets Dufaure puis Waddington (1878-79), il devient ministre des travaux publics dans le cabinet Ferry (1880). Président du groupe de la Gauche démocratique et vice-président de la Chambre, il reprend le portefeuille des travaux publics dans le gouvernement Brisson (1885), avant de prendre celui des finances, qu'il conserve avec Freycinet (1886). Il est élu par le congrès à la présidence de la République, lors de la crise politique de 1887. Il fait face au scandale de Panama et à l'agitation boulangiste. Il est l'un des artisans de l'alliance franco-russe. Le 24 juin 1894, à l'Exposition de Lyon, il est assassiné par un anarchiste italien, Santo Caserio. Réf [1].

[20] Ndlr : Stanilas Charles Dupuy de Lôme (1816-1885), polytechnicien (X 1835, génie maritime). Directeur des constructions navales et du matériel du ministère de la Marine (1857), il fait blinder les navires de guerre et construit la "Gloire", l'"Invincible" et la "Normandie" (1858). Réf [1].

[21] Ndlr : lancé en 1850, premier navire de ligne à vapeur au monde, avec 90 canons. Lors de la campagne de Crimée (1854), des deux escadres mouillées dans la mer Egée, seule l'escadre française réussit à vaincre le courant des Dardanelles. Réf [2].

[22] Ndlr : Stanilas Charles Dupuy de Lôme (1816-1885), polytechnicien (X 1835, génie maritime). Directeur des constructions navales et du matériel du ministère de la Marine (1857), il fait blinder les navires de guerre et construit la "Gloire", l'"Invincible" et la "Normandie" (1858). Réf. [1].

[23] Ndlr : lancé en 1850, premier navire de ligne à vapeur au monde, avec 90 canons. Lors de la campagne de Crimée (1854), des deux escadres mouillées dans la mer Egée, seule l'escadre française réussit à vaincre le courant des Dardanelles. Réf. [2].

[24] Ndlr : bosses faibles que l'on fixe de distance en distance sur une amarre ou une chaîne. Elles absorbent les chocs en travaillant successivement jusqu'à la rupture. Une bosse est un bout de cordage ou de chaîne fixé par une de ses extrémités et qui, s'enroulant autour d'un cordage ou d'une chaîne sur lesquels s'exerce un effort, les maintient immobile par le frottement. Réf. [5].

[25] Ndlr : Siméon Bourgeois (1815-1887) créa effectivement avec Brun le 1er sous-marin à propulsion mécanique le « Plongeur » (nom de code Q00) en 1863. Le sous-marin « L’amiral Bourgeois » fut baptisé en 1912 en son honneur. Réf. [2].

[26] Ndlr : Blessure légère reçue en disséquant ou en faisant une opération chirurgicale, et qui produit souvent les accidents les plus graves et même la mort, par infection ou empoisonnement sanguin. Réf. [16].

[27] Ndlr : Le comte Justin Napoléon Samuel Prosper de Chasseloup-Laubat (1805-1873) fut ministre de l’Algérie et des Colonies en 1859 puis ministre de la Marine et des Colonies 1860 à 1867. Réf. [2], [17].

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