André Veilhan & Gabrielle
Barba
- La période de Moulins – 1914 à 1919 -
<--- Retour à la page André Veilhan
Période précédente |
Période de Moulins | Période suivante |
|||||
1914 | 1915 | 1916 | 1917 | 1918 | 1919 |
Tout le texte qui suit est issu du livre de Pol Veilhan sur la vie de ses parents :
Le déménagement de Ker-Huella
eut lieu le 2 février 1914. Nous allions habiter l'immeuble de la Société
des Chemins de Fer Économiques au 28 rue de Refembre à Moulins. A Pâques, les 3 pensionnaires de St Charles vinrent passer leurs vacances dans la nouvelle maison jusqu’au 22 avril. Les parents les suivent à leur départ et sont à Morlaix du 27 avril au 1er mai. Du 27 mai au 5 juin, ma grand-mère [1] vint à Moulins. Ce fut son dernier déplacement . Les 17 et 24 juillet, retours successifs des 3 frères. René avait été reçu à la première partie de son baccalauréat à Rennes. A cette époque les âges de la famille s'échelonnaient ainsi :
Puis ce fut la guerre. Mobilisé sur place, mon père fut naturellement accablé de travail à la mobilisation, une partie du personnel des bureaux étant parti à l’armée. René l’aida pendant plusieurs nuits. L'été passa dans l'atmosphère d'angoisse et d'attente. La « prière du soir » dite en commun était particulièrement fervente. Ma tante Jeanne Vachon avait quitté Saint-Brieuc pour s’installer à Lyon. Mon grand-père Barba s’était alors installé à Moulins, dans un appartement au 1er étage du 47 boulevard Ledru-Rollin. Il avait alors 74 ans et depuis la mort de sa femme en 1892 il avait conservé la même façon de s’habiller. Tout en noir, avec plastron de chemise empesé et nœud de cravate noué. Il venait chaque jour nous voir, le plus souvent à la fin du déjeuner. Les enfants essayaient de se rendre utiles : René à l'infirmerie de la gare (c’était le moment où les blessés arrivaient, couchés sur la paille dans les wagons à bestiaux). Yves et Pol faisaient à bicyclette des courses pour les hôpitaux. A la rentrée des classes en octobre, René repart à St Charles, Yves est à St Gilles, Pol au lycée (il ne croyait plus être excommunié...) et Jo dans des cours particuliers. Mes parents organisent leur vie à Moulins, se faisant
très vite des amis dont les enfants se lièrent avec leurs enfants
: les Tiersonnier, Tréchot, Généraux. On faisait le dimanche
quelques promenades à pied dans les environs, ou parfois plus lointaines
en prenant le train. Ma mère me faisait étudier mon violon et
accompagnait mes premiers morceaux. Le soir elle s’occupait des études
des petits pendant que les grands allaient faire leurs devoirs chez grand-père
qui les terrifiait quelque peu ! [1] A Moulins, il y avait l\'électricité. Mais ma grand-mère, à Vaufuget, ne connaissait que la bougie et la lampe à pétrole. On lui expliqua qu'à son chevet il y avait une " poire " et qu'il suffisait d'appuyer sur le bouton pour avoir de la lumière. Alors ma grand-mère demanda des allumettes pour allumer la bougie et trouver la poire ...
Mon père va en Bretagne du 15 au 21 mai. Il loua Ker-Huella, malgré sa première intention de le conserver pour les vacances. Mais la guerre avait détruit ce projet. Ker-Huella fut loué jusqu’en 1923 et finalement vendu. René revint de St Charles fin juin et est reçu à la 2e partie du Baccalauréat à Lyon. Il décide alors de s’engager. Mes parents firent tout leur possible pour le détourner de ce projet et René finit par s’enfuir de la maison pour essayer de partir à l’armée. Mes parents cédèrent alors, mais René était encore si enfant que plusieurs médecins militaires refusèrent de l’incorporer. C’est uniquement parce que mon père connaissait un major du 16e d’Infanterie que René fut pris « par faveur » à ce régiment à Montbrison. Geneviève Rolland était venue
en juin à Moulins et mon père avait emmené sa nièce
dans une tournée de plusieurs jours sur ses lignes. René, qui avait fait quelques courtes apparitions dans l’invraisemblable accoutrement militaire de l’arrière, qui accentuait encore sa jeunesse, avait été reçu au peloton préparant le concours d’Élève-Aspirant et envoyé à Montluçon. Mes parents allèrent le voir les 31 octobre et 1er novembre. Ma mère fit un crochet par Lyon pour voir sa sœur Jeanne et mon père alla à Celles-sur-Cher, plaider devant le juge de paix la cause d’Yves et de Pol, arrêtés en août par la gendarmerie comme espions et relâchés non sans mal mais avec deux ou trois procès-verbaux. Ma mère est à Paris du 9 au
13 novembre pour un mariage Petiet et mon père lui succède les
16 et 17 novembre pour rencontrer ses amis Laurent.
En janvier, ma mère va à Lyon pour des consultations médicales concernant Alain et Jo. Le 20 janvier, René, en permission, passe à Moulins et repart avec son père pour Paris. Il entre à l’école d’Aspirants de Joinville. Ma mère va le voir du 18 au 23 mars et mon père du 7 au 10 avril. Les 22 et 23 avril, René va, en permission,
à Vaufuget voir sa grand-mère, et mes parents avec Alain et Jo
se joignent à lui.
Dès qu’il put envoyer un mot de Martigny, ma mère s’y rendit et passa auprès de lui les journées du 8 au 14 novembre. Le 20 novembre, mas parents assistent
au mariage de leur nièce Yvonne Veilhan (fille unique de Georges,
frère de mon père) et de Louis Fère.
René passa plusieurs mois dans les hôpitaux. En avril 1917, il était en traitement à Vichy et mes parents allèrent le voir alternativement les 19 et 22 avril et le 9 mai. Puis René est affecté au dépôt de son régiment à Montbrison et mes parents vont le voir les 26-28 juin. Nous passons l’été dans une maison de campagne à Chapon, près de Thiers, jusqu’au 10 septembre. Notre tante Marcel Barba s’était jointe à nous avec ses 4 enfants et René put y venir passer une journée. Du 15 au 21 septembre, mes parents sont à Morlaix avec René et assistent au mariage de Suzanne Laurent, fille de mon parrain, et de M. Dupont. Les 14-16 octobre, mon père m’accompagne à Clermont-Ferrand pour l’oral de la 1e partie du baccalauréat (échec !). René bouillait d’impatience
à Montbrison, mais il avait été déclaré inapte
à l’infanterie. Il demanda à passer dans l’artillerie
et fut envoyé à l’École d’application de Fontainebleau.
Mon père alla le voir les 4 et 5 décembre.
Yves voulait s’engager comme l’avait fait René mais les médecins militaires le refusèrent à Clermont, Nevers et Grenoble où mon père et lui se présentèrent entre le 20 et le 27 janvier.
Ce fut la dernière fois que la famille se trouva réunie au complet et on prit une dernière photographie. René partit pour Salonique d’où il fut envoyé en Serbie. 1918 fut l’année de la fin de la guerre et ... de la « grippe espagnole ». Je tombe très gravement malade et Geneviève Rolland est atteinte aussi en décembre. On doit la transporter à Blois et mes parents vont l’un après l’autre à Vouvray et à Blois en décembre 1918 et janvier 1919.
Puis ma mère m’accompagna dans le Midi où
je devais passer ma convalescence. Nous séjournâmes au Lavandou
et à Cannes, fin janvier et février. Ainsi se termine la période de Moulins. Elle avait été entièrement sous le signe de la guerre et de ses inquiétudes, non encore terminées, pour René. Bien des membres de la famille proche avaient été tués ou blessés. L’argent se dépréciait et mes parents n’avaient plus la même aisance qu’à Morlaix. Ils devaient commencer à se restreindre pour beaucoup de choses. Ils en souffraient certainement et assistaient aux bouleversements de leur ancien monde, sans pouvoir s’assimiler facilement dans le nouveau. Le changement de situation de mon père allait poser des problèmes qui ne seraient pas résolus sans peines ni renoncements. |